LE PARACETAMOL FACTEUR DE RISQUE POUR LES FOETUS
La prise d'antalgiques légers (aspirine, anti-inflammatoires, mais aussi paracétamol)
au cours de la grossesse constitue un facteur de risque d'anomalies du développement
de l'appareil reproducteur des fœtus mâles. C'est la conclusion de l'étude menée par une
équipe réunissant des chercheurs français, danois et finlandais, auprès de 2 300 femmes
danoises ou finlandaises. Jusqu'ici, cette notion avait été démontrée chez l'animal.
L'étude, publiée lundi 8 novembre sur le site de la revue Human Reproduction, indique que les
garçons danois dont la mère avait pris ces antalgiques pendant leur grossesse, ont plus fréquemment
une cryptorchidie — testicule restant en position abdominale et ne descendant pas dans les bourses
—, et ce d'autant plus que la mère a pris une dose importante d'antalgiques. Le risque est accru en
cas de prise de ces médicaments au cours du deuxième trimestre de la grossesse, ainsi qu'en cas de
consommation de plusieurs types d'antalgiques légers.
Cette association entre la prise d'antalgiques et l'anomalie n'est cependant pas retrouvée pour
les femmes finlandaises. Les résultats indiquant que le paracétamol pourrait lui aussi avoir
un effet de perturbateur endocrinien sont confortés par l'expérimentation animale chez le rat.
SOURCES DE PROBLÈMES DE FERTILITÉ ULTÉRIEURS
Comme pour beaucoup de perturbateurs endocriniens, l'action antiandrogène
(l'hormone masculine) de ces médicaments serait due à l'inhibition de la
synthèse de molécules appelées prostaglandines impliquées, entre autres,
dans la douleur et la fièvre. L'équipe, notamment dirigée par le professeur
Bernard Jégou (Inserm U625, université de Rennes), rappelle qu'en Europe et
aux Etats-Unis, plus de la moitié des femmes enceintes rapportent consommer
des antalgiques légers, le plus souvent du paracétamol.
Les experts concluent que la prise de paracétamol et d'autres antalgiques
légers par les femmes enceintes pourrait s'ajouter à d'autres perturbateurs
endocriniens antiandrogéniques et contribuer à des anomalies de l'appareil
reproducteur chez les enfants mâles, sources de problèmes de fertilité ultérieurs.
Les auteurs entendent continuer de suivre les garçons dont les mères ont participé
à l'étude, certains entrant dans la puberté.
Paul Benkimoun
Le Monde du 10 novembre 2010
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